La Plante du Mois #13 : L’Hellébore

Bonjour ! J’espère que vous allez bien. Aujourd’hui, pour les fêtes, nous parlerons de L’Hellébore !

Erebor ?

Non non, l’Hellébore ! L’Hellébore est un nom vernaculaire qui regroupe plusieurs plantes.

Voici les différentes plantes regroupées sous le nom d’Hellébore :



Aujourd’hui, nous parlerons de Helleborus niger, la véritable Rose de Noël.

Helleborus niger est une plante vivace de la famille des Renonculacées. C’est une famille que nous n’avons pas encore décrite ici ! On leur reconnaît une grande variabilité au niveau des traits biologiques (forme, mode de vie, tolérances aux températures…) mais on leur trouve au moins un point commun : elles sont toutes toxiques pour résister aux herbivores ! Elles ont aussi souvent des grandes fleurs.

Notre rose de Noël a de grosses fleurs aux pétales d’un blanc pur à un blanc rosé soutenu, avec 5 sépales et beaucoup d’étamines. On dit qu’elles sont disposées en cyme : c’est à dire que au bout d’un axe, on a une fleur solitaire.

On dit que les feuilles sont pédalées :

Et non pas que vous pédalez dans la choucroute

Remarquez-vous quelque chose ? En fait, les roses de Noël sont acaules, c’est à dire qu’elles n’ont pas de tiges ! Si si, regardez bien, ce ne sont que des pétioles (feuilles) et des pédoncules (fleurs) ! Quant à leurs racines, elles sont noires.

Les roses de Noël se reproduisent grâce aux insectes qui la butinent : elles sont entomogames et mellifères. Mais en plus de ça, les graines possèdent un élaïosome qui sont des excroissances charnues (ici chez une autre espèce, l’Hellébore fétide) :

Les élaïosomes sont riches en lipides et en protéines et sont utilisés par les fourmis pour nourrir leurs larves. Les graines d’Helleborus se font donc transporter à dos de fourmis ! La graine libérée de l’élaïosome est ensuite jetée à la poubelle de la fourmillière… qui contient beaucoup de matière organique favorable au développement de la plante. C’est une symbiose !

C’est fou !

Utilisation :

L’hellébore est cultivée dans les jardins et jardinières ou en pots d’intérieur pour la décoration mais ce n’est pas une fleur facile à cultiver.

CC0

Elle est aussi un sujet de recherche scientifique parce qu’elle a des propriétés particulières : le périanthe (pétales + sépales) développe après que le plant ait été fertilisé la capacité de faire de la photosynthèse ! Normalement, ce sont les parties vertes qui font cela.
De plus, la graine d’Helleborus nigra contient bien un embryon mais celui-ci n’est pas mature, il termine son développement en dehors de la plante mère.

Elle est aussi utilisée dans la recherche contre le cancer !

Enfin, la rose de Noël a des propriétés curatives et vermifuges, utilisées dans la médecine vétérinaire populaire dans les pays de l’Est où la plante prospère. Au cours de l’Histoire, on pensait qu’elle soignait la goutte et même la folie, ce n’était pas exact, on la confondait avec une autre Hellébore.

Les racines noires d’Hellébore ont été utilisées en tant que teinture.

Voyons la vie en Rose pour Noël !

Parmi les remèdes populaires, il y en a un assez pittoresque : si un animal de bétail était empoisonné, il fallait lui percer l’oreille et placer dans le trou une racine noire d’hellébore. Guérison en 24h garantie, disait-on…

Revenons-en à l’éthymologie. Du grec heleïn : « faire mourir » et bora : « nourriture », nous voyons là que les Anciens avaient bien cerné le végétal… On en mange, on en meure ! Plante de magie noire, elle était aussi appelée herbe aux fous, pied de griffon, pied de lion, patte d’ours, rose de serpent ou pain de couleuvre.

C’est Dioscoride, qui le premier, décrit la plante et la couleur noire de ses racines comme remède.

Herbe aux fous ? En effet !
Virgile nous raconte l’histoire mythologique des filles de Pnœtus, roi d’Argos, qui serait devenues folles suite à la colère du dieu Bacchus, dieu de l’ivresse et de la folie. En effet, elles se croyaient changées en génisses et couraient à travers champs en poussant des beuglements. Le berger Mélampode leur fit boire de l’extrait d’Hellébore et les délivra de leur démence.

La nef des fous de Jérôme Bosch (1498) : Home : Info : Pic, Domaine public

Le demi-dieu Hercule aurait également été libéré de la folie qui l’a conduit à assassiner sa femme, Mégara, et leurs enfants grâce à une dédoction d’Hellébore préparée par un habitant de l’île d’Anticyre. De là vient une vieille expression

Mettre le cap sur Anticyre

qui signifie donner des signes de démence.

Saluons l’humour d’un livre qui semble croustillant : Les mots délicieusement surannés (ça aurait fait un bon cadeau de Noël)

On nous donne ici la posologie à respecter en cas de folie


Coup de folie : une cuillère à soupe
Quart d’heure de folie : deux à trois gouttes.
Folies Bergères : sans objet.
Folie des grandeurs : deux cuillères à café, matin midi et soir. Renouveler le traitement jusqu’à dégonflement total de l’occiput.
Folie amoureuse : une dose par semaine à diluer dans de l’eau fraîche.
Folie meurtrière : deux doses.
NE PAS UTILISER EN CAS DE FOLIE DOUCE.

Les mots délicieusement suranés, Olivier Genevois

On retrouve aussi l’Hellébore dans un texte bien français et très connu : Les Fables de La Fontaine !

Voici un extrait du Lièvre et de la Tortue :


Rien ne sert de courir; il faut partir à point :
Le lièvre et la tortue en sont un témoignage.
«Gageons, dit celle-ci, que vous n’atteindrez point
Sitôt que moi ce but.
– Sitôt? Êtes-vous sage ?
           Repartit l’animal léger :
           Ma commère, il vous faut purger
           Avec quatre grains d’hellébore
.
           – Sage ou non, je parie encore. »
           Ainsi fut fait; et de tous deux
           On mit près du but les enjeux :
           Savoir quoi, ce n’est pas l’affaire,
           Ni de quel juge l’on convint.

Le Lièvre et la Tortue, Jean de la Fontaine

Mais la tortue n’était pas folle et n’eut pas besoin de la rose de Noël ! Juste de partir à point.

Bon réveillon, joyeux Noël et meilleurs vœux chers curieux de nature ! Passez de belles fêtes et à la prochaine !

Auteur : Mathilde P.

Sources :

P. Tarkowski et al., « Cytokinins in the perianth, carpels, and developing fruit of Helleborus niger L. », J Exp Bot, vol. 57, nᵒ 10, p. 2237‑2247, juill. 2006.

« Le jardin des 9 carrés – ROYAUMONT – abbaye & fondation », Fondation Royaumont. [En ligne]. Disponible sur: https://www.royaumont.com/fr/abbaye-jardin-9-carres. [Consulté le: 23-déc-2018].

« Revue d’histoire de la pharmacie, 48e année, N. 165, 1960. », vol. 48, nᵒ 165, 1960.

« fable Jean de La Fontaine : le lièvre et la tortue ». [En ligne]. Disponible sur: http://www.la-fontaine-ch-thierry.net/lievtort.htm. [Consulté le: 23-déc-2018].

Images :

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Par Ghislain118 http://www.fleurs-des-montagnes.net — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=13556745

Couverture : CC0

1 réflexion sur « La Plante du Mois #13 : L’Hellébore »

  1. Bravo Mathilde,
    beau reportage intéressant sur l’hellébore. C’est une plante que j’aime beaucoup . J’en ai d’ailleurs dans mon jardin . Elle est blanche.

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